L’EXTRAORDINAIRE PARCOURS DU LIEUTENANT LEON STOJOWSKI

 

 

 

« Le lieutenant Stojowski Léon ne pouvait se douter que la décision qu’il prendrait le 19 septembre 1939 allait bouleverser le cours de sa vie. Une certaine idée de l’honneur, de la liberté, allait lui faire parcourir des milliers de kilomètres, livrer des quantités de batailles, naviguer sur tous les océans de la planète, et vivre pendant cinq années une multitude d’aventures invraisemblables... Mais surtout, il ne se doutait pas, que jamais plus il ne reverrait sa terre natale. »

 

 

Léon Stojowski est né le 22 juin 1915 à Stanislawow en Pologne. Il passe le baccalauréat et rentre à l’école des officiers de la même ville en 1935. Il est aspirant au 48ème régiment d’infanterie des Carpates . Mais lorsque la guerre éclate le 1er septembre 1939, il combat les Allemands avec une unité des chasseurs de Podhale. Ses deux frères sont également officiers, Boleslaw le plus vieux est lieutenant d’infanterie, prés de Varsovie, le second, Jòzef est capitaine vétérinaire dans la cavalerie. Les trois frères sont des hommes de la nature, des « Gòrale » (montagnards), qui adorent leur liberté et leur pays. Ces sentiments vont déterminer leurs destinées à travers toutes ces années de guerre.

Le 19 septembre 39, Léon Stojowski part se réfugier en Hongrie après la dissolution de son unité. Il est interné à Esztergom. Quelques semaines plus tard, il s’évade pour aller à Budapest et rejoint la France avec l’aide d’une comtesse (Mme Palawicini ) et en compagnie du général Marian Kukiel. Il est hébergé à Paris dans une caserne avec d’autres officiers pendant 15 jours. Il rejoint ensuite Coëtquidan d’où il partira pour Narvik avec les chasseurs de Podhale en compagnie des légionnaires français. A son retour, il participe à la campagne de France et se bat en Bretagne et prend le dernier bateau pour l’Angleterre.

Aprés deux défaites consécutives, le lieutenant décide de s’embarquer comme simple matelot sur le paquebot polonais « Batory » transformé en transport de troupes. Il participe pendant un an à de nombreux convois alors que la bataille de l’Atlantique fait rage.

En 1941, Léon Stojowski retourne en Ecosse pour continuer la lutte avec le général Maczek. Il est réintégré dans son ancienne unité des chasseurs de Podhale qui vient de renaître de ses cendres. Au mois d’août 44, il débarque à Arromanches et participe à la bataille de Caen et à la fermeture de la poche de Falaise (opération « Maczuga »). Il est l’un des seuls officiers   de son unité avec le capitaineTkac à sortir indemne de cette sanglante bataille.Cette victoire a un goût amer, car il vient d’apprendre que son frère Jòzef a été tué pendant la prise de Monte Cassino en Italie. Après quelques jours de repos, les chasseurs de Podhale sont durement engagés  pour la libération d’Abbeville. Ils se dirigent ensuite vers Hesdin, St Omer, Aires-sur-la-Lys. (4 et 5 sept 44)

Le 6 septembre la division entre en Belgique, le lieutenant Stojowski est encore à la pointe du combat à Ypres. Ensuite, ce sont les villes de Roulers, Gand, Lokeren, St Nicolas et Anvers qui sont libérées. Vient le tour de la Hollande : les chasseurs de Podhlale s’illustrent à Hulst, Wolfsputten, Merxplas, Zondereigen, et surtout à Alpenschedijk où ils livrent bataille du 2 au 27 octobre 44. Quant à Breda, la ville hollandaise fête pendant quatre jours ses libérateurs avec son enthousiasme inoubliable. Puis la longue marche vers la victoire finale reprend avec le canal Mark, Ter Appel et Winschoten le 15 avril 45.

La dernière étape du long périple du lieutenant Stojowski le mène en Allemagne où il se bat pour la première fois le 20 avril à Aschendorf. Quelle revanche sur la campagne de Pologne en septembre 40 ! ! ! Enfin les derniers combats des chasseurs de Podhale ont lieu à Papen-bourg, Holtelmoor et Stockhausen le 4 mai 45.

L’immense bonheur de la fin de la guerre est très vite oublié par la grande désillusion de ne pas pouvoir retourner dans son pays natal. Yalta et les communistes sont passés par là et Stanislawow, la ville natale du lieutenant Stojowski est devenue soviétique ( Ivano-frankowsk ). Le grand rêve s’écroule pour des milliers de soldats polonais…
Le 1er mars 46 le lieutenant-colonel Complak, commandant le bataillon des chasseurs de Podhale et le consul britannique remettent au lieutenant Stojowski la Military Cross, une des plus hautes distinctions militaires anglaises.

L’occupation sur le sol allemand se termine au début de l’année 47, la 1ère DB est rapatriée en Angleterre, il faut donc prendre une décision. Mais que faire et où aller ? Après 12 années passées sous les drapeaux, on ne sait faire que la guerre et l’on appréhende le retour à la vie civile…

En 1940, il existe une coutume en France qui consiste à donner à chaque soldat une marraine de guerre. Les soldats polonais qui sont intégrés dans le corps expéditionnaire français pour Narvik ont donc eu, eux aussi leur marraine. Léon Stojowski a toujours gardé précieusement son adresse sans vraiment savoir pourquoi. Elle s’appelle Elisabeth Kura et habite le Pas-de-Calais. Il décide donc de faire connaissance avec les immigrés polonais du nord de la France dont beaucoup se sont engagés dans la première DB après la libération de leur région.

Coupés de leurs racines familiales et culturelles, les soldats du général Maczek s’éparpillent sur toute la planète et rejoignent souvent les nombreuses communautés polonaises déjà établies sur tous les continents.

C’est ainsi qu’au mois de mars 1948, Léon Stojowski épouse Melle Hilda Kura la sœur de sa marraine de guerre qui est aussi une ancienne résistante du réseau "monica". Mais le retour à la vie civile ne se fait pas sans mal et les petits boulots s’enchaînent ; ouvrier en usine, agent de sécurité… pour terminer au fond de la mine pendant plus de 15 années. Léon Stojowski s’est reconstruit un petit monde dont les limites correspondent à son épouse et à son fils Richard. Mais les portes du monde extérieur se sont définitivement refermées. Personne ne s’intéresse à ceux qui ont combattu pour la liberté des peuples. La guerre est loin…tout comme la Pologne qui reste un éternel regret.

Après une tragique et longue expérience de la guerre, il est impossible de réintégrer une vie civile normale, les séquelles physiques ou psychologiques sont là et ont marqué les hommes à tout jamais. Véritable héros de la dernière guerre, Léon Stojowski a vécu reclus dans son petit univers pendant plus de 50 années. Il parlait couramment l’anglais et l’allemand mais n’employait que très rarement la langue française… Sa dernière réflexion devrait interpeller toutes les générations qui n’ont pas connu le dernier conflit mondial. 

«  Les hommes qui ont donné leur jeunesse pour votre liberté ont tous été profanés de leur vivant… »

Il s’est éteint le 11 juillet 1999 à l’âge de 84ans.

 

Décorations du lieutenant LEON STOJOWSKI :

--- Military Cross

--- Croix de guerre

--- 1939/45 Star

--- France and Germany Star

--- Croix du combattant    PL: krzyz waleczny

--- Croix du combatant     F

--- croix du combattant volontaire    F

 

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